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L’effet des traumas sur la mémoire et les émotions

Les événements traumatiques laissent souvent des traces bien au-delà du moment où ils se produisent. Même lorsque le danger est passé, le corps et l’esprit peuvent continuer à en ressentir les effets. Comprendre comment le trauma influence la mémoire et les émotions est essentiel pour en saisir la complexité — et pour entrevoir les voies possibles de guérison.


Quand le cerveau enregistre l’insupportable


Face à un événement perçu comme une menace vitale (accident, agression, catastrophe, violence psychologique ou perte brutale), notre cerveau met en place un mécanisme de survie. L’amygdale, véritable “alarme émotionnelle”, s’active pour nous maintenir en vigilance maximale. Le cortisol et l’adrénaline inondent alors l’organisme.

Mais dans cette urgence, une autre région — l’hippocampe, siège de la mémoire autobiographique — se trouve partiellement “déconnectée”. Le cerveau n’enregistre plus les faits de manière linéaire et cohérente. Le souvenir devient fragmenté, parfois sensoriel : une odeur, un bruit, une image peuvent réactiver la peur comme si tout recommençait.


C’est ainsi que certains patients disent :

“Je sais que c’est fini, mais mon corps, lui, ne le sait pas.”

Mémoire traumatique et émotions : une empreinte durable


Le traumatisme modifie durablement la régulation émotionnelle. Les émotions liées au trauma — peur, honte, colère, impuissance — peuvent rester “bloquées” dans le système nerveux. Chez certaines personnes, cela se traduit par de l’hypervigilance, des cauchemars, des reviviscences ou au contraire par une dissociation, un détachement émotionnel, voire une amnésie partielle de l’événement.


Ces manifestations ne traduisent pas une faiblesse mais un mécanisme de protection. Le psychisme tente de contenir ce qui a été insupportable, quitte à couper le lien avec une partie de soi ou de sa mémoire.


Quand le passé s’invite dans le présent


Les traumas non intégrés peuvent influencer notre manière de percevoir et de réagir dans la vie quotidienne. Une simple situation banale peut réactiver, inconsciemment, une ancienne émotion liée au danger. Ce décalage entre la réalité actuelle et la réaction émotionnelle crée souvent de la souffrance et de l’incompréhension.


Ce phénomène est souvent observé chez les personnes présentant un trouble de stress post-traumatique, mais aussi dans des formes plus diffuses de mal-être : anxiété chronique, irritabilité, troubles relationnels ou sentiment d’insécurité permanent.


Les approches thérapeutiques : renouer avec la sécurité intérieure


Heureusement, la mémoire traumatique n’est pas figée. Les recherches en neurosciences ont montré que le cerveau garde une capacité de plasticité et de réorganisation.

Certaines approches psychothérapeutiques permettent de retraiter l’événement traumatique, en restaurant un sentiment de sécurité et en réintégrant le souvenir dans une narration cohérente.


Parmi ces approches, on retrouve notamment :


  • L’EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing), qui aide à retraiter les souvenirs traumatiques par des stimulations bilatérales alternées.

  • La thérapie sensorimotrice et l’approche somatique (comme le Somatic Experiencing), qui reconnectent corps et émotions en travaillant sur les sensations physiques de sécurité.

  • Les thérapies d’inspiration psychodynamique, qui permettent de donner sens à ce qui a été vécu et de reconstruire une continuité du soi.

  • Les thérapies cognitives et comportementales (TCC), qui aident à modifier les pensées et réactions conditionnées par le trauma.


Le fil conducteur de ces accompagnements est toujours la reconstruction d’un sentiment de sécurité intérieure — condition nécessaire pour revisiter le passé sans se sentir à nouveau submergé.


Retrouver une mémoire apaisée


Guérir d’un trauma ne signifie pas oublier, mais pouvoir se souvenir sans revivre.

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C’est retrouver la liberté d’éprouver des émotions ajustées au présent, d’habiter son corps et son histoire avec davantage de sérénité.


Ce travail demande du temps, de la patience et un cadre thérapeutique sécurisant. Mais il ouvre la voie à une transformation profonde : celle de redevenir auteur de sa propre histoire.


En résumé : Le trauma bouleverse à la fois la mémoire et les émotions, en laissant parfois des fragments d’expérience non intégrés. Mais grâce à la compréhension de ces mécanismes et à un accompagnement thérapeutique adapté, il est possible de retisser les liens entre le passé et le présent, et de retrouver une cohérence intérieure apaisée.


 
 
 

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